Beaucoup de livres mériteraient d’être épinglés, offerts et lus. Les maisons d’édition regorgent de richesses qui nous humanisent. A une semaine de Noël, nous vous en avons épinglés trois.
Albrecht BURKARDT et Jérôme GREVY (dir), Ruines politiques, PUR, 2023, 346p.

L’émotion romantique et la fièvre de la restauration ont fait négliger à quel point la ruine est bien plus qu’un vestige du passé en voie de disparition. La ruine est en réalité une construction symbolique qui s’impose dans le paysage au moment où elle est considérée, non plus comme un amas de pierres, mais comme un reste du passé dont il s’agit d’honorer les bâtisseurs, de rappeler les usages, de conserver ou de rétablir le souvenir d’événements mémorables.
Les ruines sont des objets dont la valeur ne se définit donc pas exclusivement à l’aide de critères esthétiques ou épistémologiques. Elles sont des lieux de mémoire dont la valorisation, qu’elle soit propre à certains groupes sociaux particuliers ou qu’elle concerne la société à part entière, est profondément négociée. Elles sont sujettes au changement historique. Aussi, c’est dans ces différents aspects que réside la nature politique des usages des ruines qui est objet de ce livre. Que font-ils de Méraude ? Que ferions-nous sans Poilvache ?
Selma LAGERLÖF, Le Livre de Noël, éd. Actes Sud Babel, (2007) 2023, 112p.

Comme les Esterlins ont voyagé vers le Nord, nous nous sommes dit qu’écouter les contes scandinaves devaient faire partie de l’identité de Poilvache.
Nourris de légendes suédoises, huit récits de Noël auxquels le talent de conteuse de Selma Lagerlöf confère un charme incomparable. Au fil de ces récits de Selma Lagerlöf, inspirés de légendes suédoises et aussi savoureux que des contes dits à la veillée – celle de Noël, bien sûr –, on fera la connaissance d’une petite fille qui reçoit un livre d’étrennes… en français, qu’elle désespère de jamais pouvoir lire. On découvrira l’origine de la légende de sainte Luce, très prisée en Suède. On saura ce que font les animaux durant la nuit de Noël et comment le rouge-gorge devint rouge. On apprendra qu’une mère peut être jalouse de sa propre fille, parce que son mari en est trop proche. On lira l’aventure d’un colporteur, voleur et repenti ; on assistera au dialogue entre un fossoyeur et le crâne d’un homme assassiné ; et l’on sera surpris par une confrontation inédite entre Jésus et Judas.
De ce recueil, profondément empreint de foi religieuse mais aussi de chaleur et de philosophie, émane ce que l’on appelle volontiers la magie de Noël : un mélange de générosité et de mélancolie, de compassion et de joie, sublimé par le talent de conteuse de Selma Lagerlöf. C’est une réédition en poche.
Andrée CORVOL, L’arbre dans la cité : histoire d’une conquête (XVIIe-XXIe siècle), éd. Le Pommier, 2023

Autrefois, l’arbre en ville était cantonné aux enclos vivriers, il n’ombrageait pas nos routes ni nos fleuves et nos canaux. Vivant plutôt à la campagne, il procurait bois, fruits, fibres et feuilles. Aujourd’hui, le végétal entre en force dans nos cités par trop minérales ; il améliore nos conditions de vie, protège le sol, régule la température, purifie l’air et atténue les bruits.
Comment l’arbre a-t-il conquis le pavé ? Cette histoire, moins utilitaire et monolithique qu’il n’y paraît, croise en fait celle de la modernité, et mérite d’être racontée. Car, bien avant la révolution industrielle et son introduction dans la cité pour assainir l’air, l’arbre s’y est fait une place dès la Révolution, comme symbole de la liberté.
Récupéré dans le champ politique, il a depuis servi à commémorer un événement, à symboliser l’autorité, à améliorer l’aménagement urbain ou encore à satisfaire le besoin de nature des administrés. Ce faisant, il a suscité à la fois colères et affections. Une histoire qui est ainsi celle des hommes, de leurs revendications et de leurs aspirations. Mort ou vif, l’arbre fait partie du roman national.
C’est un petit clin d’oeil à nos Pins noirs d’Autriche et un livre qui nous permettra peut-être de voir la nature de nos ruines autrement.
« Vobis omnia bona plecor » : nous vous souhaitons par cette prière de très agréables fêtes de Noël et toute bonne chose pour l’an Neuf !









